Appel de Dieu... Vie donnée… Vie volée !
- Choisir la Lumière CD
- 28 mars
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 31 mars

Je rencontre la Communauté Chrétienne de Formation lors d’un « week-end A » en décembre 1982. Je découvre un groupe de jeunes cherchant Dieu et se formant pour engager leur vie dans une « grande radicalité pour Dieu ».
J’ai 21 ans, je suis en recherche vocationnelle. J’ai jusque-là cheminé au sein d’une paroisse et d’un groupe scout, mais j’ai besoin de plus. A travers la C.C.F, puis les week-ends « Apôtres des temps nouveaux » il me semble avoir trouvé le lieu d’église où l’engagement de ma vie est possible. J’ai très à cœur de m’engager pour l’annonce de l’Evangile, dans une radicalité : « tout pour Dieu ! ». J’y vais en toute confiance : C.C.F et les Fondations du Monde Nouveau se définissent comme « communauté catholique à vocation œcuménique » et mettent en avant les soutiens et cautions de cardinaux et évêques de l’époque.
En septembre 1984, je déménage sur Paris pour m’engager plus radicalement au sein de la CCF.
En septembre 1985 je deviens permanente (c’est à dire employée à temps plein au service de la communauté) et m’engage dans « l’auto-financement » de ce temps plein….
De septembre 1985 à janvier 1992, pendant presque 7 années je suis permanente au sein de la Communauté Chrétienne de Formation, puis des Fondations pour un Monde Nouveau. Je vis l’enthousiasme de l’engagement, de la prière et des partages en profondeur dans les maisonnées communautaires. Formée sur le plan humain et théologique sur mes propres deniers, je m’investis dans l’animation, le service, les accompagnements, l’organisation de week-ends et sessions. En janvier 1991, ayant rejoint le siège de la communauté à Montesson, je tiens en plus le standard téléphonique en soirée et pendant deux mois, je fais même du ménage au domicile d’un des responsables, à sa demande, car son épouse, souffrant de son peu de disponibilité pour la vie familiale, a besoin de soutien. Je me rends compte maintenant que j’étais complètement sous emprise pour avoir accepté cela.
Dans ce temps de permanence, une grande part de mon énergie est consacrée à la recherche de parrainage présentée comme « une occasion de témoigner et de constituer une petite communauté de parrains engagés avec moi dans cette mission ». Je remercie encore les personnes qui à l’époque m’ont soutenue.
Cette recherche de parrainage est de l’ordre du « chacun pour soi » : aucune solidarité fraternelle, ni soutien envers ceux qui ont des difficultés pour trouver des fonds, aucune transparence quant au niveau de vie réel, ni au statut social des uns et des autres. N’étant pas une responsable nationale « en vue », et étant issue d’un milieu plutôt modeste, je n’ai pas le réseau ni la reconnaissance nécessaires pour trouver suffisamment de parrains. Subvenir à mes besoins matériels devient vite mon principal souci (me loger, me nourrir, me former, financer ma couverture sociale). Et que dire de la dîme (10 % de nos revenus mensuels donnés pour la communauté) ? Pendant ces 7 années, je ne peux pas cotiser pour la retraite, ayant juste de quoi vivre.
Je vis dans cette période une grande insécurité, le souci du lendemain et un biais dans mes relations : comment, en effet, ne pas en arriver à aborder les personnes comme « de potentiels futurs parrains » ? Comment ne pas avoir d’attente sur l’autre ? Où est la gratuité de la relation ?
Souffrances et difficultés sont à chaque fois mises sur le compte de blessures personnelles, ou plus grave encore d’un manque de foi. La Bible est utilisée pour conforter cette lecture perverse de la réalité.
L’épuisement et les doutes, le souci du lendemain et de l’avenir (dont la retraite), la très, trop grande solitude dans cet engagement dans l’autofinancement, et le manque de solidarité dans la communauté finissent par m’user.
Epuisée, insécure, « lessivée » je prends le risque de quitter les Fondations, en janvier 1992. Il me faut plusieurs mois pour reconnaître l’état d’épuisement et le leurre dans lequel j’étais. Je reprends mon métier et commence à mesurer le retentissement psychologique de toutes ces années passées dans les Fondations et l’abus spirituel dont j’ai été victime. En 1995 et plus récemment encore, je fais une démarche de demande de reconnaissance et de réparation et me heurte à un rejet !
J’ai été trompée, abusée dans ma confiance. C’est un abus de conscience que d’être sans cesse renvoyé à soi au nom de « blessures personnelles », c’est un abus spirituel que d’utiliser la prière et la Bible contre des « blessures personnelles » alors que les difficultés, les inégalités, et les dysfonctionnements objectifs existent. C’est un abus de confiance lorsque le fondateur et responsable de cette communauté a, en fait, un comportement à mille lieux de l’Évangile … et que le système communautaire mis en place s’avère délétère pour un bon nombre de ceux qui s’y engagent.
Ma foi, mon élan vers Dieu et ma générosité ont été dévoyés. Ma relation et mon engagement vis-à-vis de Dieu ont été abusés.
Evelyne